Prof. Charles-Henri Rapin – 1947 – 2008 – Un pionnier des soins palliatifs
Durant toute sa carrière, menée en Suisse et à l’étranger, il s’est battu sans relâche pour changer le regard de la médecine et de la société sur les personnes âgées et la fin de vie.
«Pour moi, ce prix est la reconnaissance d’un engagement de plus de vingt ans pour un modèle humaniste de la médecine, pour une médecine de la personne plutôt qu’une médecine d’organe, pour un hôpital sans douleur et pour la dignité des mourants», avait déclaré Charles-Henri Rapin en recevant le prix 2002 du Forum d’Engelberg. Une profession de foi qui a guidé toute sa vie de praticien chaleureux et charismatique qui a suscité de nombreuses vocations en Suisse et dans le monde francophone.
Charles-Henri Rapin est pourtant devenu médecin presque par hasard. Né en 1947 à Genève, il passe toute son enfance à Carouge, son port d’attache où il était revenu vivre. Issu d’une famille d’origine fribourgeoise et très modeste, il confiera plus tard que son passage au collège Calvin, alors encore très élitaire, «c’était dur». A l’époque, il se destine à la théologie, mais une année ratée le décide à abandonner le collège. Il obtiendra finalement une maturité fédérale.
A l’université, il opte pour la médecine, mais sans enthousiasme particulier. Sa rencontre avec le professeur Jean-Pierre Junod, fondateur de la gériatrie à Genève, change tout ; il a trouvé sa voie.
Désormais, Charles-Henri Rapin s’engage sur tous les fronts : il bataille pour faire accepter le recours à la morphine pour soulager les douleurs des cancéreux et des mourants, introduit l’éthique clinique dans les soins, encourage la formation d’équipes multidisciplinaires, alerte sur la maltraitance. Attentif à la qualité de vie des personnes âgées, il encouragera les programmes de prévention par de nombreux ouvrages et conférences et soutient le maintien à domicile.
Expert de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), Charles-Henri Rapin a enseigné aux universités de Genève, Montréal et Québec et dispensé de nombreux cours dans celles de Lausanne, Lyon, Grenoble et Saint Etienne. A Genève, il sera médecin-chef du centre de soins continus (Cesco) de 1982 à 1993 et nommé professeur en soins palliatifs en 1994. En 2001, il avait été appelé à la tête du pôle « Vieillissement » du réseau académique franco-suisse CLUSE et, plus récemment à la direction académique de l’Institut Universitaire Kurt Bösch à Sion où il avait fondé l’unité «Ethique et fin de vie».
C’est d’ailleurs à la fin d’une soirée passée avec des étudiants de master de cet institut qu’il a succombé à une malaise cardiaque, le 10 juillet.
Charles-Henri Rapin est également à l’origine de nombreuses associations professionnelles, parmi lesquelles la Société suisse de Médecine et de Soins Palliatifs ou «Ensemble contre la douleur». Il avait aussi fondé « PROSCA », l’Association de soutien aux personnes touchées par le cancer de la prostate, une maladie dont il avait lui-même souffert.
Anne Kauffmann